La section «Focus» des 61es Journées de Soleure met le kitsch en vedette. Une sélection de productions internationales présente des fictions et des documentaires qui soit jouent ouvertement avec la sentimentalité et l’artifice, soit en interrogent les dimensions politiques et sociales. Des tables rondes et performances avec des invité.e.s de Suisse et de l’étranger viennent compléter le programme.
Le kitsch et le septième art ont toujours fait bon ménage, aussi bien dans les films d’auteur que dans le mainstream. Si Agnès Varda, Pedro Almodóvar ou Chantal Akerman font appel à une trivialité apparente, c’est pour questionner les conventions sociales et pour souligner la manière dont le sentimentalisme et les clichés consolident les rapports de genre et les hiérarchies sociales.
Même aujourd’hui, le kitsch est omniprésent. Les critiques de cinéma en dénoncent la surabondance, tandis que les institutions culturelles établies brouillent les frontières entre l’art et le kitsch, qu’il s’agisse d’oeuvres classiques ou de produits de l’IA. La distinction entre démarche artistique et exploitation commerciale est de moins en moins évidente. C’est ce qu’ont révélé les débats autour de la performance de Nemo à l’Eurovision ou de films grand public comme «Barbie», voire de productions plus confidentielles comme la trilogie queer et feel good «Oslo Stories». Quelles normes esthétiques subsistent de nos jours? De quelles hiérarchies sociales dépendent-elles? Et quels dangers renferme le kitsch lorsqu’il tombe dans des mains antidémocratiques?
Le kitsch entre art et business
La section «Focus» des Journées de Soleure comporte deux volets. Une série de débats permet aux professionnel·le·s du cinéma (de la réalisation à la musique, en passant par la scénographie et la conception de costumes) d’exprimer leur vision du kitsch et de partager leurs expériences et réactions face aux préjugés associés à ce style. Leurs échanges avec des critiques et des expert.e.s en médias, en histoire de l’art et en sociologie éclairent la portée culturelle et sociale du kitsch – un sujet brûlant à l’heure où les débats artistiques se politisent, où la création subit une pression économique croissante et où l’intelligence artificielle produit ses propres clichés à partir d’algorithmes.
La réalisatrice française Lucile Hadžihalilović présente son nouveau film «La Tour de Glace» (avec Marion Cotillard dans le rôle principal), une ode à l’effet bienfaisant du cinéma et aux films de contes de fées des années 1970. Elle explique, en compagnie de la scénographe Julia Irribarria, comment elle met en scène les émotions avec des moyens cinématographiques.
Le programme présente une sélection de fictions et de documentaires internationaux qui ne reculent pas devant le sentimentalisme et en explorent l’effet social et politique, notamment dans le documentaire brésilien «The Voice of God» de Miguel Antunes Ramos où est mis à nu le lien entre les enfants prêcheurs et le populisme de droite.
Le kitsch dans le cinéma numérique, enfin, fait l’objet d’une analyse approfondie. Lors d’une performance en direct, le collectif multimédia autrichien «Total Refusal» lève le voile sur la production de son oeuvre multiprimée «Machinimas». Celle-ci révèle les rapports de force sous-jacents à l’univers (kitsch?) du gaming à travers une série de courts métrages basés sur des jeux en ligne populaires.
Responsable du programme «Fokus»: Julia Zutavern
Chaque année, les Journées de Soleure présentent dans la section «Focus» un programme spécial de films étrangers placés sous l’enseigne d’un thème d’actualité. La «Journée Focus» permet d’en discuter lors de rencontres et d’entretiens avec des invité.e.s internationaux.ales.
Le programme «Focus» est soutenu par la Fondation Däster-Schild.
Les discussions lundi 26 janvier 2026 au Kino Uferbau:
09:45 – 11:15 Émotions imposées
14:45 – 16:15 Assez kitsch
Performance dimanche 25 janvier 2026 au Kino Uferbau:
14:45 – 16:15 Performance de Total Refusal: Everyday Daylight